Entre la loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire, et la réélection de Pierre Albrieux à sa tête, NAVSA tourne une nouvelle page capitale de son histoire.
Quand Pierre Albrieux est arrivé à la Présidence de NAVSA (Chambre syndicale NAtionale de Vente et Services Automatiques) en 2016, la seule fédération professionnelle représentative du secteur de la distribution automatique alimentaire, celle-ci fonctionnait avec un Président, un unique Délégué Général et une assistante. « Depuis sa naissance dans les années 1950, cette jeune Fédération, qui compte aujourd’hui 240 entreprises, a toujours fonctionné avec peu de salariés ; mais il s’est d’abord agi pour moi de repenser l’organisation afin d’être plus efficace, surtout en cette période cruciale, » commente Pierre Albrieux. Geste fort, il décide d’avoir deux Délégués Généraux (Yoann Chuffart et Diane Thomas) à l’exact même niveau de responsabilité et de rémunération, avec des missions interchangeables tout en ayant chacun une mission particulière : Yoann Chuffart se charge plus spécifiquement de la représentation des intérêts de la profession auprès des pouvoirs publics, quand Diane Thomas assure de manière prioritaire les relations avec les adhérents, la stratégie et les actions de communication de NAVSA (voir portraits). Si NAVSA a pour missions essentielles de fédérer tous les « gestionnaires » de distributeurs automatiques – et avec eux les fabricants de matériel, les fabricants de produits et les services dits « associés » – et de défendre leurs intérêts auprès des pouvoirs publics, le quotidien de NAVSA a consisté pendant longtemps en des missions de fond : relation avec la CGI, gestionnaire de la Convention Collective 3044, négociation des salaires, réponses aux questions spécifiques des adhérents ou encore information sur la mise en oeuvre des nouvelles réglementations. Mais la situation a évolué ces derniers mois et la Fédération doit faire face à une crise sans précédent avec la présentation au Parlement en septembre du projet de loi « économie circulaire » porté par la Secrétaire d’Etat Brune Poirson et adopté en première lecture au Sénat début octobre, qui fixe une priorité : lutter contre les déchets plastiques. Dans un avenir plus lointain, NAVSA devra aussi affronter la baisse mécanique des cotisations des adhérents due aux rachats de plus en plus fréquents des entreprises du secteur.
De l’usage du plastique…
Avec 80 000 tonnes de plastique perdues chaque année et, selon les sources, entre 1,82 et 4,53 millions de tonnes de déchets plastiques produits par an en France, le projet de loi met deux sujets brûlants sur la table des gestionnaires de distributeurs automatiques : l’interdiction de certains objets en plastique à usage unique, en substance la « spatule » et le gobelet en plastique, et un éventuel retour à la consigne. « Nous sommes d’ores et déjà sûrs que la spatule en plastique (la « touillette ») sera interdite en janvier 2020. Bien sûr, il existe des solutions alternatives, mais toutes coûtent plus cher aux gestionnaires, qui doivent faire face à une augmentation des coûts et à une baisse de leur marge » explique Pierre Albrieux. Mais ce qui augure « d’une crise sans précédent dans l’Histoire de NAVSA », c’est l’incertitude cardinale qui pèse sur l’usage des gobelets en plastique. « Aujourd’hui, il n’est pas possible de servir des boissons chaudes dans des gobelets 100 % carton ; pour éviter les fuites, il faut des gobelets en carton « pelliculé » comportant environ 10 % de plastique. Or nous ne savons pas encore si ce type de gobelets sera autorisé par le législateur à moyen terme ni quel pourcentage maximum de plastique sera toléré » précise-t-il. Par ailleurs, de nouveaux gobelets 100 % carton et sans pellicule ont récemment vu le jour, mais sans la garantie qu’ils soient « machinables », c’est-à-dire qu’ils puissent être intégrés à des distributeurs automatiques, ni que les additifs qu’ils contiennent – pulvérisés sur les parois du gobelet afin d’assurer son étanchéité – ne soient pas également écartés prochainement par le législateur ou le pouvoir réglementaire. Ce qui inquiète surtout Pierre Albrieux et plus largement NAVSA, c’est le manque de clarté de la part des pouvoirs publics, aussi bien l’administration que les parlementaires ; s’agit–il de trouver des solutions alternatives au gobelet en plastique – y compris au carton pelliculé qui contient du plastique – ou d’interdire purement et simplement le jetable, quel que soit le matériau ? La Fédération se plie donc en quatre pour essayer d’être entendue et oeuvre pour que la loi ne s’écrive pas contre les entreprises mais avec elles. « Ce qui devient urgent, c’est de pouvoir parler d’une seule voix à nos adhérents et d’avoir des réponses précises de la part de l’Etat : quel gobelet sera autorisé ? Pour combien de temps ? Et avec quel pourcentage de plastique ? » résume Pierre Albrieux.
Vers la consigne ?
Deuxième sujet de taille : la mise en place éventuelle d’un dispositif de consigne pour les canettes en acier et en aluminium et les bouteilles en PET. « Ce sujet rencontre l’opposition des élus locaux car les communes récupèrent de l’argent en collectant le plastique et la majorité à l’Assemblée semble divisée sur le sujet, quoique le projet semble emporter de nouveau l’adhésion d’une part importante des députés LREM » déplore Pierre Albrieux. Si un schéma hypothétique pour la consigne a été communiqué à NAVSA, de nombreuses zones d’ombre demeurent et la concertation qui suivra l’adoption définitive du projet devra se faire avec la Fédération. « Pour être très clairs, nous ne souhaitons pas que la charge financière de la consigne revienne aux gestionnaires des distributeurs automatiques ». Pour faire face au tsunami qui touche en plein coeur le monde de la DA, il était essentiel pour Pierre Albrieux d’insuffler « une nouvelle dynamique et une souplesse de start-up à la Fédération. Le statut de cadre-dirigeant permet à chaque Délégué Général d’organiser librement son temps de travail, parfois en faisant du télétravail, parfois en m’accompagnant en déplacement, en tout cas cela permet de travailler plus lorsque nous avons des auditions au Sénat ou d’autres impondérables ». Et l’on comprend que le Président ait besoin d’être épaulé puisque ce dernier cumule à la fois ses fonctions de Président de la Fédération et son rôle de Chef d’entreprise au sein d’Alfragest, une entreprise spécialisée dans l’exploitation de distributeurs automatiques alimentaires. Heureusement, une nouvelle recrue devrait rejoindre l’équipe NAVSA très bientôt. Outre les problèmes que le projet de loi pose aujourd’hui à la Fédération, nul doute qu’il permettra aussi, à terme, de répondre à l’un des défis majeurs de notre temps : notre responsabilité à tous face aux enjeux climatiques.